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Monjangaia

Monjangaia

C'est un blog d'informations et d'analyses sur l'actualité internationale en général, et, malgache, en particulier.

Publié le par Eddy Rabe
Le "Voron-tsara dia"* fait peau neuve.

Comme c'est une nouvelle version du blog, je vous retranscris ici certains articles publiés sur l'ancienne version. Celui, ci-après, a été publié le 11 avril 2012. Bonne lecture!

Lors de sa sortie médiatique du 23 mars dernier, le Président de la Transition de Madagascar, Andry Rajoelina l'a annoncé. Air Madagascar, la compagnie aérienne malgache au sein de laquelle l'Etat malgache détient la majorité des parts, va se doter de 2 nouveaux appareils long-courriers. Il s'agit de 2 Airbus A340-300.

"L'acquisition de ces 2 Airbus par la compagnie aérienne nationale constitue pour moi une grande fierté". C'est en ces termes que Andry Rajoelina a soufflé la nouvelle sur le plateau de TV Plus. Elle a été rendue officielle la semaine dernière par le staff dirigeant de la compagnie malgache lors d'une conférence de presse animée par son directeur général, Hugues Ratsiferana. En effet, la compagnie aérienne fait partie des patrimoines de Madagascar qui suscite beaucoup d'intérêt et de fierté pour les Malgaches. La fierté surgit quand celle-ci se porte bien et c'est tout le peuple malgache qui s'identifie fièrement à Air Madagascar avec l'acquisition de ces appareils. Toutefois, bien de questions reviennent sur la place publique sur les critères de fond, notamment techniques et financiers, qui ont poussé Air Mad à porter son choix pour un appareil d'Airbus. Historiquement en effet, Air Mad a toujours choisi le constructeur américain Boeing pour étoffer sa flotte. Il va sans dire que la lutte a toujours été âpre entre les 2 constructeurs pour s'approprier les faveurs de la compagnie malgache. Et cette lutte dure depuis le début des années 90; et depuis, Boeing a toujours raflé la mise. Au-delà du domaine purement technique, viennent s'immiscer également les décisions politiques; Air Madagascar appartenant majoritairement à l'Etat malgache.

La donne a changé

Durant l'ère Ravalomanana, le poids politique dans les décisions d'orientation de la compagnie était immense. Ravalomanana en personne, passionné de surcroît d'aéronautique et de transport aérien, a pris à bras-le-corps le redressement de la compagnie nationale. Et quand on connaît l'importance de la diplomatie américaine, qui l'a toujours soutenu sans ambages depuis son accession au pouvoir jusqu'à aujourd'hui, à son exil, on comprend mieux également la place occupée par le constructeur américain et les compagnies anglo-saxonnes au sein de Air Madagascar au détriment du consortium européen et de toute intervention de la France. Mais en avril 2011, lorsque les 2 aéronefs de Air Madagascar, 2 Boeing 767 ont été frappés d'interdiction de vol dans l'espace aérien de l'Union européenne et qu'Air Mad a besoin de nouveaux appareils pour se relancer et desservir l'Europe, la donne a changé. Elle a changé car la Transition au pouvoir est fortement soutenue par la France qui défend derrière elle les intérêts non seulement de sa compagnie nationale, Air France, mais aussi, ceux du constructeur européen. La suite, on la connaît. Les 2 constructeurs entrent en lice et ce sont 2 anciens Airbus A340-300 de Air France qui ont été retenus au détriment de Boeing 777.

A 340 la plus économique

Sur le plan technique et financier, Air Mad s'en défend avançant une meilleure rentabilité, notamment en coût de carburant, sur l'exploitation d'un Airbus A340 par rapport à un Boeing 777. Ce qui est vrai malgré les critiques. Le modèle acquis par Air Mad, l'A340-300 est la variante des A340 la plus économique en termes de consommation avec une capacité de près de 300 passagers et un rayon d'action de plus de 12.000 Km sans escale, malgré qu'il soit équipé de 4 réacteurs contre 2 pour un Boeing 777. Il offre aussi un avantage par rapport aux coûts de maintenance selon les experts, ce qui n'est pas négligeable dans la situation de Air Madagascar. Ajouter à cela les agréments de confort, notamment le silence en cabine, par rapport aux boeing, on pourrait dire que la compagnie malgache a fait un bon choix.

"Acquisition" n'est pas approprié

Mais ce qui a été omis d'être soulevé ou tout simplement révélé par Air Madagascar, c'est le fait que les A340 ne sont plus en production. Ce fait ne portera-t-il pas un effet néfaste sur la maintenance et, par ricochet, sur l'exploitation? Quand on connaît la rigueur et les normes imposées par l'Union Européenne sur la sécurité des avions survolant son ciel, la question mérite d'être posée; d'autant que l'Europe constitue la principale destination desservie par ces appareils. Qu'en est-il également des coûts de formation des techniciens et des personnels navigants naturellement habitués aux Boeing? Et puis, il ne faut pas oublier que le terme d'acquisition n'est pas ici approprié car les 2 Airbus seront, dans un premier temps, loués pendant 06 ans par Air France à Air Madagascar. Ce n'est qu'au bout de cette échéance que les appareils lui seront acquis. A combien vont réellement lui revenir ces 2 appareils? Ce leasing, car ce dont il s'agit, est-il bénéfique, à long terme pour Air Madagascar? Le temps nous le dira peut-être. C'est là où le choix des ces Airbus s'apparente à des choix politiques parce que la confidentialité derrière laquelle se réfugie Air Madagascar sur ces nombreuses zones d'ombre ressemble fort à un secret d'Etat. Aussi, qu'on se le dise, tout le monde a trouvé son compte dans l'histoire. D'abord, Air Madagascar qui n'a pas les moyens de s'offrir de nouveaux appareils pour sa part de marché la plus importante, c'est-à-dire l'Europe mais qui, du coup, a pu saisir l'opportunité de s'en acquérir. Ensuite, Air France, par la même occasion la France et Airbus, qui a trouvé les moyens de recycler sa flotte sur les vieux appareils long-courriers tels les A340 au profit de nouveaux avions du type Airbus A350 ou Boeing 787, encore beaucoup plus économiques à l'exploitation. Enfin, la Transition qui inclut dans son bilan des projets réalisés cette page des Airbus de Air Madagascar qui sera, sans aucun doute, soulevée lors de la prochaine présidentielle. En témoignent la fierté affichée et la joie non dissimulée de Andry Rajoelina sur le plateau de TV Plus. Quoi qu'il en soit le "Voron-tsara dia" aura fait peau neuve et il ne reste plus qu'à lui souhaiter bon vol avec ses 2 nouveaux habits.

* : surnom commercial donné à Air Madagascar, signifiant, littéralement, l'oiseau qui fait bon vol.

EDDY RABE

Ici, l'Airbus A340-600 mais les nouveaux appareils d'Air Madagascar sont des Airbus A340-300, commercialisés il y a 19 ans.

Ici, l'Airbus A340-600 mais les nouveaux appareils d'Air Madagascar sont des Airbus A340-300, commercialisés il y a 19 ans.

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