Faneva Andriatsima célébrant son but de la 77ème minute face à la RDC lors du 1/8ème de finale, son premier but dans la compétition. Le capitaine des Barea symbolise la renaissance de cette équipe avec le sélectionneur Nicolas Dupuis. Il a investi humainement et financièrement à la constitution de ce groupe, à la mise en place d'une structure et à la recherche de moyens matériels dignes d'une équipe nationale (voir L'Equipe du 07/072019). Respect!
Les Barea de Madagascar seront opposés aux Aigles de Carthage de la Tunisie pour le compte du quart de finale de la CAN 2019. Une étape de plus à franchir pour nos héros malgaches dans cette compétition qui leur a fait entrer dans l'histoire. L'exploit est d'ores et déjà réalisé, il suffit maintenant de le prolonger le plus longtemps possible. Pour cela, il faudra passer par ce quart de finale et venir à bout de la Tunisie. Rendez-vous est pris pour ce jeudi à 21H00 (heure française) au Caire (Egypte).
A la fin du match face à la RDC, un match à rebondissements, qui a hissé les Barea en quarts de finale, les joueurs malgaches, en zone mixte, ont été clairs face à la presse. Ils n'ont pas d'adversaire préférentiel; ils seront prêts à affronter ce quart de finale quelle que soit l'équipe en face. A ce moment-là, ils ne connaissaient pas encore leurs adversaires. Le match entre la Tunisie et le Ghana ayant été disputé le lendemain (08/07/19). En quelque sorte, l'état d'esprit des Barea est cohérent avec l'événement en cours. En se qualifiant pour les quarts, ils savent pertinemment qu'ils sont entrés dans la cour des Grands et qu'il ne faut plus se cacher. L'exploit est déjà écrit, il reste désormais à rendre une histoire, la plus longue possible. Les Tunisiens le savent aussi, ils restent les favoris mais les Barea sont devenus des outsiders redoutables qu'il ne faut plus prendre de haut. Les Congolais l'ont bien appris à leurs dépens, comme si le fait de diffuser en boucle sur le compte WhatsApp de leur sélection le résumé du match à Madagascar montrant leur victoire écrasante 6-1, suffisait à faire ébranler les Barea à ce huitième de finale.
Tout le monde est prévenu. Le Petit Poucet (sobriquet attribué par le sélectionneur malgache à son équipe et repris par la presse étrangère) grimpe les marches à pas de géant. Les joueurs malgaches eux-mêmes sont prévenus. A ce stade de la compétition, l'enthousiasme en soi ne suffit pas; il faut se surpasser, tout donner jusqu'au dernier souffle. La demi-mesure ne pardonne pas. Il faut répéter les mêmes efforts reproduits lors du 1/8ème de finale, lorsque, au plus fort de la domination des Congolais en fin de la deuxième mi-temps et en prolongation, on voyait des guerriers ne rien lâcher et défendre ensemble, se sacrifiant les uns pour les autres malgré la fatigue. On voyait également des joueurs solides mentalement malgré le but égalisateur de la RDC à la dernière minute du temps réglementaire; des joueurs qui ont foi en leur destin, celui de gagner le match et de faire rêver tout un peuple. La preuve en est lors de la séance des tirs aux buts: aucun des tireurs malgaches n'a tremblé et ils ont tous rempli avec succès leurs responsabilités.
Des morts par crise cardiaque
La ferveur et la joie ressenties dans le vestiaire des Barea après le match, marquées aussi par le passage du président de la République, Andry Rajoelina, montrent à quel point ce groupe vit bien. Le sens du sacrifice y est bien ancré et il est bien conscient du chemin parcouru, du périple des qualifications à travers les contrées africaines jusqu'à ce quart de finale de la CAN. On l'a maintes fois répété, les Barea ont réussi leur CAN, les objectifs sont largement remplis. Les joueurs sont conscients qu'ils reviennent de loin, de tellement loin qu'ils n'ont pas envie de renoncer et rêvent de figurer encore plus haut dans cette grande compétition. Leur état d'esprit sur le terrain lors du 1/8ème de finale montre leur appétence insatiable à la victoire. Poussés par l'enthousiasme général de toute une nation, ils savent aussi qu'ils portent sur leurs épaules tout l'espoir d'un peuple à retrouver enfin la fierté de son pays. A chaque interview, les joueurs malgaches n'omettent jamais de souligner l'importance du peuple malgache dans leur parcours, comme si, ils sont redevables envers ce peuple mais c'est ce peuple qui leur est reconnaissant à jamais. Cette reconnaissance est due à cette grande unité retrouvée dans le pays car à Madagascar, l'avènement Barea dépasse tout entendement. On vit Barea à chaque instant de la vie quotidienne et dans toutes les couches sociales, des grandes villes au fin fond des terres reculées. L'émotion et la passion pour cette équipe sont tellement intenses au pays de sorte qu'on a déploré des morts par crise cardiaque à l'issue de la séance des tirs aux buts dimanche dernier.
Mais les choses sérieuses arrivent vite. Il faudra enfiler dès jeudi les bleus de chauffe. Les Barea ne disposent que de trois jours pour récupérer, gérer la pression et l'émotion ainsi que préparer le match contre la Tunisie. C'est ce laps de temps court qui préoccupe le plus d'ailleurs le sélectionneur, Nicolas Dupuis, car dans ces trois jours, il a fallu compter le déplacement dans la journée d'hier d'Alexandrie au Caire, lieu de la rencontre. La Tunisie, entraînée par l'ancienne gloire du football français, Alain Giresse, connait aussi les mêmes contraintes mais elle dispose en son sein des joueurs évoluant dans des clubs beaucoup plus rompus à disputer plusieurs matchs dans une période courte. Le gros travail du staff malgache réside donc sur la récupération, la manière de faire retomber l'euphorie pour retrouver la plénitude de la concentration le temps de la préparation du match jusqu'au coup de sifflet final. Ce qui est sûr, c'est que les joueurs vont toujours répondre présents sur le mental. Cette équipe construite par Nicolas Dupuis et Faneva Andriatsima, le capitaine, a tellement connu d'anecdotes malencontreuses indignes d'une équipe nationale (voir L'Equipe du 07 juillet 2019) avant de se retrouver à ce stade de quart de finale de la CAN, qu'elle ne peut avoir les boules au ventre dans un match où elle a tout à gagner et rien à perdre. Mais il s'agit d'un quart de finale d'une compétition internationale de haut niveau face à une équipe prestigieuse qui compte une CAN dans son palmarès. La méfiance reste toujours de rigueur. Les Tunisiens vont tout donner dans la bataille, à n'en pas douter, avec probablement, la titularisation de Wahbi Khazri, leur maître à jouer. Il a complètement changé la physionomie de jeu des Tunisiens à son entrée en jeu face au Ghana en ayant été également à l'origine de l'ouverture du score pour son équipe. Toutefois, le retour de Marco Ilaimaharitra, forfait lors du huitième de finale va apporter de la fraîcheur et de la stabilité dans le milieu de terrain des Barea. Il faudra aussi être vigilant défensivement pour éviter de concéder des pénaltys car l'usage de la VAR (assistance vidéo à l'arbitrage) sera appliqué lors de ces quarts de finale. Au-delà de toutes analyses sportives et objectives, pour tout Malgache où qu'il soit, les Barea ne seront pas seuls ce jeudi 11 juillet 2019. Leur souffle, leur coeur et même leurs prières les accompagneront sur le terrain ce jour-là. A présent, le rêve est permis; tout est permis...
MIARA-MIRONA. ALEFA BAREA!*
*: Tous ensemble. Allez-y Barea!
Eddy Rabe