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Monjangaia

Monjangaia

C'est un blog d'informations et d'analyses sur l'actualité internationale en général, et, malgache, en particulier.

Publié le par Eddy Rabe
Gouvernement Kolo: vers une opposition du MAPAR?

Le premier gouvernement de la IVème République formé, l'Exécutif peut enfin s'atteler sur le redressement du pays tant attendu par des millions de Malgaches. Comme il l'a maintes fois martelé, le Président de la République a souhaité mettre en place un gouvernement d'ouverture. C'est chose faite. Le gouvernement intègre des représentants de toutes tendances politiques, que ce soit les adversaires d'hier lors de la présidentielle, la mouvance Ravalomanana, entre autres; ou encore celles qui ont toujours voué un soutien indéfectible au président dès l'annonce de sa candidature. On y retrouve également de nouvelles têtes inconnues du monde politique et même des candidats malheureux à la présidentielle. On peut dire que la Présidence de la République a habilement mené les tractations sur la composition de ce gouvernement en contentant tout le monde. Mais tout le monde justement ne peut se réjouir du résultat, et en particulier, le MAPAR de Andry Rajoelina qui a été supplanté par le Président de la République sur la nomination du Premier ministre et qui a vu certains de ses éléments influents faire défection en rejoignant le gouvernement de Kolo Roger.

A la présentation du nouveau gouvernement, les observateurs politiques s'attendaient à voir un nouveau paysage politique avec de nouvelles personnalités au sein du gouvernement. D'autant que ce n'était pas les candidatures qui manquaient; on parlait d'une liste de CV de postulants aux postes ministériels pouvant atteindre 3 mètres de hauteur lors des entretiens du Premier ministre à l'Hôtel Colbert. Certes, de nouvelles têtes ont intégré le nouveau gouvernement mais l'impression générale ne ressent pas le changement radical tant souhaité par l'opinion que par la communauté internationale. Le Président de la République et le Premier ministre ont fait du neuf avec du vieux. A l'issue de la passation du pouvoir entre l'ancien et le nouveau Premier ministre, Kolo Roger a bien annoncé que seul un ou deux membres de l'ancien gouvernement intègreraient le nouveau. C'est manqué; ils ont été plus de deux à avoir été reconduits dans son gouvernement. A sa décharge, il faut reconnaître que l'entourage du Chef de l'Etat a fortement pesé sur la formation du gouvernement. Obnubilé par le désir d'ouverture, celui-ci a dû contenter les tendances politiques qui ont bien voulu l'aider à former une majorité au sein de l'Assemblée Nationale pour contrecarrer le MAPAR. Mais au passage, la Présidence de la République n'a pas omis de mettre sous sa tutelle les postes stratégiques. Ainsi, on retrouve des proches du Président de la République aux commandes des ministères de grande envergure et qui présentent des intérêts stratégiques pour le pays comme le ministère d'Etat chargé des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire ou encore le ministère auprès de la Présidence chargé des ressources stratégiques. Et ces calculs politiques de reconnaissance en tous genres ont amené à des chevauchements de compétences des ministères ou à l'accroissement des dépenses publiques en séparant deux ministères qui pourraient bien fusionner. Il en est ainsi du ministère chargé des infrastructures et de l'équipement face aux ministères des travaux publics, des transports ou du tourisme; du ministère de l'environnement face au ministère de l'eau ou encore du ministère de l'économie face à celui de l'industrie et du développement du secteur privé. En ces temps où Madagascar doit se serrer la ceinture dans son fonctionnement pour rétablir les comptes publics et favoriser les dépenses pour le développement ayant des impacts directs sur la vie des plus démunis, comment justifier ces gratifications ministérielles? Comment va également réagir la communauté internationale, en général, les Etats-Unis, en particulier? Les Etats-Unis qui ont réclamé le "redoublement zéro" pour les nouveaux membres du gouvernement. On s'attendait à un peu plus de panache de la part du Chef de l'Etat sur la composition du gouvernement après la longue attente de la nomination du Premier ministre; c'est raté. L'Exécutif est désormais condamné à une obligation de résultats rapides et immédiats.

Opération de débauchage

Mais si on peut parler de perdant dans ce nouveau pouvoir, et à moindre mesure, dans la nomination du Premier ministre et dans la formation du gouvernement, c'est bien Andry Rajoelina et consorts regroupés dans le MAPAR. Hery Rajaonarimampianina a littéralement tourné le dos à Andry Rajoelina et le MAPAR, une fois arrivé au pouvoir. Soucieux d'instaurer la rupture et l'ouverture, le Chef de l'Etat a fait fi de la majorité obtenue par le MAPAR au sein de la Chambre Basse et a oeuvré pendant les 3 mois d'attente de la nomination du Premier pour une autre majorité. L'entreprise a réussi et on connait aujourd'hui la suite avec la nomination de Kolo Roger. Au lendemain de cette nomination, le MAPAR s'est bien démarqué en dénonçant le caractère inconstitutionnel de la nomination et on s'attendait à un bras de fer juridique sur ce point entre l'ancien président de la transition et le Chef de l'Etat. Mais c'était sans compter l'opération de "débauchage" diligentée par la Présidence pour faire intégrer dans le gouvernement des figures du MAPAR. Ainsi Maharante Jean de Dieu, coordonnateur général du MAPAR, anciennement membre du Conseil Supérieur de la Transition et fidèle parmi les fidèles de Andry Rajoelina et Johanita Ndahimananjara, membre influente du bureau du MAPAR ont rejoint l'équipe de Kolo Roger. L'UDR-C de Reboza Julien, une des composantes du MAPAR, a fait également savoir qu'il soutiendrait le gouvernement dès la passation du pouvoir à Mahazoarivo; résultat: le frère de Reboza Julien, Reboza Cyrille s'est vu octroyer le portefeuille de la communication. Le MAPAR est tombé de haut et sa majorité fond comme neige au soleil au point de changer considérablement le rapport de force au sein de l'Assemblée Nationale. Du coup, le duel attendu entre le Chef de l'Etat et le MAPAR risque de ne pas avoir lieu, tant la formation de Andry Rajoelina ressort affaiblie de l'histoire. A moins que le MAPAR ne se constitue opposition; et ce qui risque de se reproduire logiquement. Mais le MAPAR osera-t-il franchir le Rubicon? Sans être dans le pouvoir, le MAPAR craint la défection de ses alliés et perdre ses acquis, notamment à l'Assemblée Nationale. Maharante Jean de Dieu a bien illustré cette crainte. Pour lui, rejoindre le gouvernement relève du pragmatisme. Tout est dit.

Compliqué que les négociations politiciennes

Quoi qu'il en soit, le MAPAR doit être lucide et accepter d'endosser le statut de l'opposition, il ne peut que ressortir grandi de cette expérience afin de mieux préparer l'alternance. Etre dans l'opposition, c'est aussi servir son pays avons-nous avancé dans ce blog (voir article par ailleurs: Primature, rupture: un début de présidence bien compliqué pour Hery Rajaonarimampianina.). Car cette déferlante offensive du nouvel Exécutif face au MAPAR ne va pas s'arrêter là. Pour le faire boire le calice jusqu'à la lie, la soi-disante nouvelle majorité présidentielle a déjà convoqué une session extraordinaire pour faire voter un nouveau règlement intérieur et remettre en cause les élections des membres du bureau permanent et des différentes commissions de la Chambre Basse déjà raflées par le MAPAR. A ce rythme où vont les choses, on ne voit pas comment le MAPAR de Andry Rajoelina ne basculerait-il pas dans l'opposition. L'Exécutif de son côté ne doit pas non plus tomber dans le triomphalisme. Les Malgaches ne l'attendent pas pour affaiblir le MAPAR. Ils veulent que ce nouveau pouvoir fasse preuve d'efficacité pour relever au plus vite le pays. Et là, ça risque d'être plus compliqué que les négociations politiciennes.

Eddy Rabe

Le Palais de Mahazoarivo, siège de la Primature de la République de Madagascar. Haut lieu symbolique de la politique malgache, ce palais fait l'objet de beaucoup de convoitises. Le nouveau pouvoir actuel n'en fait pas exception. Mahazoarivo a marqué le déchirement entre le Président Rajaonarimampianina et sa famille politique naturelle, le MAPAR de Andry Rajoelina, qui l'a pourtant porté au pouvoir.

Le Palais de Mahazoarivo, siège de la Primature de la République de Madagascar. Haut lieu symbolique de la politique malgache, ce palais fait l'objet de beaucoup de convoitises. Le nouveau pouvoir actuel n'en fait pas exception. Mahazoarivo a marqué le déchirement entre le Président Rajaonarimampianina et sa famille politique naturelle, le MAPAR de Andry Rajoelina, qui l'a pourtant porté au pouvoir.

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R
Bonjour<br /> Très bon article.Beaucoup de perspicacité quoique un peu BCBG. C'est un article de grande classe; ce n'est pas vulgaire du tout.voilà ce que je veux dire et je t'encourage toujours. Le français est très bon, à moins que tu aies un bon correcteur. Tu ne m'as pas dit que tu étais jounaliste??? Je suis fier de toi, très fier. Ton Papa doit l'être aussi, c'est sa bénédiction qui te fait réussir..
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